samedi 21 août 2010

L' ARTISTE DE TALA

Je vient de découvrir les œuvres d'un jeune bien de chez nous ,  diplômé des Beaux arts d'Alger, Hacene Ait Ziane , est un artiste au sens latge du terme , je ne vais pas me la jouer critique d'art , mais pour moi , ses oeuvres sont a crochées dans les plus belles galeries ...Londre New York ou Paris.
le vous laisse admirer ,et pour l'encourager voici le lien de sa page facebook
http://www.facebook.com/hocine.aitziane?ref=search#!/hacene.aitziane

Patriarche of Assif el hema
Sebkhat Timimoune

Emina souvenir d'orient de Emil Luis-Pinel De Grand Champs
Repoduction de ETIEN DINET

mercredi 18 août 2010

URAR A IGHIL BWAMAS

Après une semaine de joutes «ludiques» et éducatives, la 4e édition des jeux d’été «Urar» a pris fin le week-end dernier à Ighil Bouamas, dans la commune Iboudrarène, par la cérémonie de remise des prix et une grande soirée artistique.
Cette activité, devenue une tradition à Ighil Bouamas, est organisée chaque année par l’association culturelle locale M’barek-Aït-Menguellet sur l’initiative de Djamel Amrani, enseignant de sport à l’université d’Oran et éducateur spécialisé qui, chaque été, consacre ses congés pour les enfants de son village afin de les initier, les orienter et corriger certains comportements psychomoteurs pour rattraper le retard de croissance. C’est une méthode de coordination et d’équilibre, sous forme ludique. Ainsi, chaque début de soirée, les jeunes filles et garçons, constitués en groupes de six ou sept, sont-ils mis en compétition, sous l’œil vigilant des encadreurs préalablement formés par le chef du projet, pour faire valoir leurs «aptitudes» physiques et mentales en surmontant des épreuves d’équilibre, de précision, d’éveil ou d’agilité, le tout dans une ambiance festive sur fond de musique «étudiée» et d’animation artistique. Selon M. Aït Abdelmalek Hocine, le secrétaire général de l’association d’Ighil Bouamas qui a tenu à rendre un grand hommage au chef de projet et initiateur de ces jeux, l’objectif recherché par ces activités, au-delà de leur caractère ludique, est de corriger chez les enfants «les difficultés de structuration spatiotemporelle, la mauvaise latéralisation et certaines maladresses motrices et gestuelles ainsi que la mauvaise exploitation de l’espace». En parallèle, les soirées sont animées par des activités culturelles avec projection de films thématiques, des soirées poétiques, des représentations théâtrales et d’autres activités qu’ont concoctées les animateurs de l’association. Pour cette année, il y a eu également l’organisation d’une tombola où les «plus chanceux » ont eu droit à des cadeaux de grande valeur grâce au concours de l’APC d’Iboudrarène qui a mis à disposition tous les moyens pour la réussite de ces jeux. C’est ce qu’a d’ailleurs souligné le maire d’Iboudrarène lors de la cérémonie de clôture qu’il a présidée. «Ce n’est qu’un petit devoir de notre part que d’encourager et de contribuer à tous les efforts fournis par votre association depuis vingt ans en faveur des enfants, de l’environnement et de notre culture», a déclaré Abdeslam Lakhal avant de remettre le premier prix aux équipes participantes. La soirée s’est terminée par un gala artistique avec notamment la chorale de la troupe de l’association sous la conduite d’une graine de star haute comme trois pommes, la petite Aït Oubelli Lynda, qui a présenté des chants, des danses et un sketch où est mis en valeur le rôle de la femme dans la société. Une représentation qui n’a pas manqué d’émerveiller le nombreux public d’Ighil Bouamas et d’arracher des youyous aux femmes présentes. Mais comment en serait-il autrement pour cette jeune artiste qui n’est autre que la petite fille du grand artiste, aujourd’hui oublié, Amar Sghir. Signalons, enfin, que le nom «Urar» donné à ces jeux est inspiré des rencontres d’antan qu’organisaient les femmes kabyles pendant l’été pour «donner libre cours à leur corps par les chants et la danse».
Sadek Aït-Salem

dimanche 15 août 2010

«Bienvenue» au magot, adieu les récoltes

La fête de «Tafaska Nweqdar ne fait pas oublier aux habitants de la région leurs déboires avec leur…ennemi : le singe Magot. Il est partout,  dans les champs, dans les ruelles du village, à l’intérieur des maisons inhabitées et sur tous les toits. Les villageois, à leur tête, le vieux  Ali B., ne savent plus où donner de la tête. «Non seulement, ces singes saccagent tous nos arbres fruitiers, nos oliviers et nos récoltes, mais ils représentent aussi un danger pour la population», observe un habitant.
La surpopulation est due à l’interdiction des fusils de chasse durant les années 90 qui a depuis, empêché toute battue, mais aussi au fait que ce primate est désormais une espèce protégée. 
Aujourd’hui, toute la population de Tala N’tazert et des villages environnants se sent menacée par cette présence massive d’autant que certains de ces primates malades transmettent la galle. Autre inconvénient de leur présence : ils arrachent même les tuiles des maisons et les balancent rageusement dans les ruelles.
Malgré les différentes requêtes auprès de toutes les instances locales, à leurs tête, le parc national de Djurdjura rien n’a été fait face à cette à cette, invasion.
Les responsables locaux «s’en lavent les mains» : «le singe magot est une race protégée », rappelle un élu. Mais cela constitue un véritable dilemme pour les citoyens qui lancent un appel aux pouvoirs publics  pour trouver une solution.

ABBAS  A.H

Poésie quand tu nous tiens !

«Tafaska Nweqdar » c’est aussi une circonstance pour déclamer la poésie. Les organisateurs ont très bien réussi le 1er concours de poésie. 10 auteurs, venus de différentes régions de Kabylie, ont déclamé leurs poèmes. Le jury est composé de trois poètes, Belaid Messaoudène, Mouloud Ait Hamou et le Grand Abdennabi Oularbi. Ce dernier n’est autre qu’un ancien compagnon de Lounis Ait Menguellet. L’objectif de cette rencontre, selon les organisateurs est de promouvoir «aswir» ou le niveau de la poésie et de la langue berbère.
Les 10 candidats rentrés en lice ont été notés à base du thème choisi, du montage du poème, de la diction, de l’utilisation de la langue et la manière de présenter le texte.
La jeune Salima D. du village Tahachat  de la localité des Ouacifs  a réussi à suspendre l’assistance à ses lèvres. «Taous Amrouche est ressuscitée aujourd’hui», a déclaré un vieux poète.
C’est  une lycéenne de 17 ans qui aime la poésie depuis son enfance. Elle a appris par cœur les chansons d’Ait Menguellet, Matoub Lounes, Zedek Mouloud et Si Moh. Ses poètes préférés ?   Nizar Qabbani et Djebran Khelil djebran.
La deuxième place est revenue à L’Hadj Lyazid suivi de Mohand Arab H. La poétesse du village, Halima Ait Ali Toudert a occupé la quatrième place. Pour ce qui est des thèmes traités, les pensées des professionnels de la rime ont été pour la nostalgie, pour l’enfance, la culture amazigh, mais aussi pour l’amour déclamé par presque tous les candidats.
Il y avait également des hommages à la femme kabyle à Djaout et à Kamel Hammadi. 

Abbas A. H.

Tala N’tazert en fête : Hymne à la transhumance

Quelle est la journée la plus marquante pour toute personne ? Un proverbe kabyle apporte la réponse. Il s’agit de celle qui consacre les retrouvailles entre amis et proches. Ainsi et pour perpétuer cet adage, le village de Tala N’tazert a organisé pour la 6e année consécutive le festival de la transhumance connu sous le nom de «Tafaska Nweqdar», une tradition ancestrale. Une occasion pour les habitants de la région d’évoquer le passé, de déclamer des poèmes et de montrer leur savoir-faire en gastronomie.
«Le rituel de transhumance était une manifestation tribale que planifiaient les zaouïas relayées par les souks. La transhumance concernait les bergers qui faisaient de l’estivage un lieu de vie avec approvisionnement et séjours dans les cabanes. Cela donnait lieu à des zerdas, des chants et des jeux de tir sur cible», explique Houria Abdennebi Oularbi chef de département de tamazight à l’université de Tizi-Ouzou.
La fermeture après 1863 des zaouïas comme  certains souks et l’irruption de l’économie coloniale, ont rompu les solidarités intertribales, ce qui a eu pour conséquence de dépouiller le rituel de transhumance de sa densité sociale jusqu'à n’être plus aujourd’hui qu’une banale manifestation économique concernant certaines familles, parfois même certains individus.
Dans les années 60, une fois les herbes des plaines telles que Tahalwant, Azru Aberkhan, Tirkabine, Avawal, totalement broutées, les gardiens de bétail étaient obligés de  mener leur cheptel plus haut, dans la montagne, pour trouver les herbes encore grasses des alpages. Ils étaient payés  2 DA par tête et par mois. Il fallait donc monter au sommet du Djurdjura, là où l’herbe est verte et l’ombre des cèdres accueillante. Là où le ruissellement des sources se marie avec le gazouillis des oiseaux. Cet endroit est situé sur la route qui mène vers Tizi N’koulal et le col de Tirourda. « Au bout de deux mois, le propriétaire du bétail ne reconnaissait plus ses veaux, tellement les bêtes étaient bien engraissées », raconte Abdellah Saïdi, agriculteur depuis 1983. Da Abdellah, pour les intimes, se souvient que «dans les années 60 et 70, il n’existait pas une famille, dans  les quatre villages de Tala n’tazert, Bouadnane, Ighil Bouamas et Darna, qui ne possédait pas au moins une vache ».
De cette tradition, il ne reste aujourd’hui que le nom, Agni N’lehoua, la plaine de la pluie. En ce jour de fête elle est «noire» de monde. Beaucoup sont venus voir la centaine de têtes éparpillées et surveillées par leurs propriétaires sur cette prairie. Ils sont aussi les témoins de la mort lente de cette transhumance, et pour cause, le vol de bétail empêche tout regroupement de cheptel. Cette rapine s'amplifie et s'étend d’ailleurs de plus en plus dans les zones reculées. A chaque fois on signale un ovin volé par ci un bovin volé par là. Les malfaiteurs, qui opèrent généralement la nuit,  profitent souvent des conditions climatiques et de la désertion des lieux.
 
RAVIVER LA TRADITION
 
N’empêche. Pour réussir cet événement, le comité de Tala N’tazert veut coûte que coûte réanimer ne serait-ce que symboliquement cette tradition en organisant un festival qui lui est dédié. Ici tout le monde met la main à la pâte. Chaque citoyen  de ce village a une tâche bien définie qu’il exerce au sein d’une commission. Celles désignées ont ainsi préparé un programme qui s’est étalé sur trois jours, et qui a débuté par un mini marathon, des conférences et une exposition sur les habits traditionnels et les photos. Le regard est fasciné par les couleurs des robes kabyles confectionnées par les talentueuses femmes du village. « La robe Kabyle est bien le symbole de beauté de la femme amazighe, cette femme libre qui a toujours été un exemple », estime une exposante. Des photos de bijoux et de paysages s’offrent également à la vue.
 
UNE AMBIANCE FESTIVELe trajet Tala N’tazert-Agwni Lahwa, (la plaine de la pluie) a ainsi vécu une ambiance exceptionnelle à l’occasion de ce festival qui a réuni non seulement les enfants du village mais tous les adeptes des randonnées pédestres. En effet, les visiteurs sont venus des quatre coins de la Kabylie, voire d’Alger, de Constantine et d’Oran.
Les processions humaines sont visibles de loin. Elles arpentent les chemins en lacets qui mènent vers Agwni Lahwa en passant par le col de Tizi  N’kouilal. Sur ce sommet qui culmine à 1 560 m d’altitude, l’on a l’impression d’être sur «le toit du monde» protégés par la canopée de la pinède et de la cédraie.
Aux You-yous joyeux des femmes, répondaient le bendir et les klaxons. Des cortèges incessants de bus réquisitionnés pour l’occasion, n’arrêtent pas de faire des va et vient. Ici, il n’y a ni canicule ni asphyxie des grandes villes, place au calme, à la tranquillité et à la quiétude. 

PLACE À LA GASTRONOMIE
 
A Tala N’tazert la fête de la transhumance est aussi une occasion pour un autre art : la gastronomie. En collaboration avec l'école de restauration et d’hôtellerie, «Jardin secret» de Tizi-Ouzou, le village a organisé un concours en la matière. Sur les 67 différents plats présentés, «Ahbul n.yennayer» a pris la tête du classement. La cuisinière n’est autre que « N’na Louiza », une vieille femme de 79 ans.
«Ahbul N yennayer est un plat ancestral, je l’ai appris avec ma grand-mère. En premier lieu, nous enlevons des végétations un bout de leurs  racines pour les laisser macérer au bout d’une semaine dans une grande bassine. Par la suite, nous préparons des galettes à base de  semoule, de pouliot et de thym, et dans une grande marmite remplie d’eau nous mettons les racines que nous recouvrons d’herbe sur laquelle nous étalons les galettes qui cuiront ainsi sous étuve.  La cuisson nécessite dix minutes. Les galettes se mangent chaudes, imbibées dans l’huile d’olive », explique N’na Louiza en présentant son plat.
Pour revenir aux règles de la compétition, les 67 différents  plats sont répartis en trois catégories : il y a des pains, des plats et des douceurs. Les notes de la commission de dégustation sont accordées sur la base du goût, de la présentation, de l’authenticité et sur la décoration. Les dégustateurs, au nombre de cinq, ont tous pris du temps pour dégager les trois meilleurs plats.
Pour le patron du «Jardin secret», Ait Bachir, qui sponsorise souvent ce genre de rencontre, «Ahbul n yennayer» est une découverte. «C’est toujours un plaisir de découvrir des plats du terroir. Le DG de cette école a proposé à Nna Ouiza de se déplacer au sein de son établissement pour «donner des cours» aux différents stagiaires en vue de les préserver.

VOIR TALA N’TAZART ET REVENIR
 
Pour clore en beauté ce festival, le comité de village a organisé une soirée artistique dans une ambiance bon enfant, lors de laquelle les chanteurs Ali Meziane et Amghidh, entre autres, ont fait vibrer la foule de leur talent. D’ailleurs, tous ceux qui ont eu l’honneur d’assister à cette fête grandiose affirment ne pas oublier de sitôt ces moments agréables qui n’ont pris fin qu’à l’aube. Les visiteurs se sont séparés à cinq heures du matin en se donnant rendez-vous pour l’année prochaine. Comme quoi celui qui visitera Tala N’tazart un jour, se promet d’y revenir. 


Abbas Aït Hamlat.

dimanche 1 août 2010

Article paru à LA TRIBUNE

Pratiqué depuis des siècles en Kabylie

L’estivage, un trait de la culture socioéconomique collective locale

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Photo : M. Lyès
La transhumance est une pratique très ancienne dans la région montagneuse de Kabylie. Elle remonte à l’avant colonisations ottomane et française. La plaine ayant toujours été utilisée pour la culture céréalière, maraîchère et fourragère, il ne restait pour l’élevage de bétail que le massif montagneux où les herbes qui y poussent peuvent atteindre jusqu’à un mètre de hauteur. Que ce soit du côté nord ou celui du sud de la montagne, l’estivage dans le Djurdjura a toujours été une activité économique sociale collective, commune à presque toutes les tribus de Kabylie. Le métier de berger, durant la période de la transhumance, était celui des adultes qui ne pouvaient l’exercer sans l’accord des chefs des villages qui se portent garants de la sécurité du bétail. L’estivage débute dès les premiers jours du printemps, mais les bergers demeurent en contrebas de la montagne, en attendant la fonte des neiges sur les sommets. Le départ à la montagne nécessite tout un rituel. Et chaque région de Kabylie a ses propres traditions. A Iboudraren, les habitants ont droit à une petite offrande, «Tharkoucht», à l’occasion du départ des bergers en montagne. Du beurre, du lait, ighi (petit-lait), des figues sèches et des galettes de pain leur sont offerts en guise de «waada» pour avoir la «bénédiction des gardiens de la montagne», selon la croyance locale. A Timeghras, Aït Abdellali, Tiroual et Tigemounine, des villages proches des Ath Boudrar, tout comme Ath Ouabane, Ath Meslayene, Iferhounène et Ath Ziki (des villages situés tous sur le versant nord du Djurdjura), ou bien du côté des Imsdourar, Imechdallen Iwakouren, pour ne citer que ces hameaux-là situés, eux, sur le versant sud du Djurdjura, le départ des bergers vers la montagne débute avec le rassemblement des cheptels sur la place du village. Les propriétaires des bovins et ovins usent de la technique du poinçonnage ou utilisent d’autres procédés comme la peinture pour marquer les bêtes. Des bêtes de sommes sont utilisées pour le transport de la nourriture, des ustensiles de cuisine et de la literie nécessaires pour la période d’estivage. Les villageois accompagnent les bergers avec des chants et des youyous jusqu’à la sortie du hameau.Dans un ouvrage collectif, la Transhumance dans le Djurdjura : un rituel autrefois collectif, coordonné par l’universitaire algérienne Houria Abdennebi–Oularbi, il est dit que «le rituel de transhumance était une manifestation tribale qu’ont planifié les pôles d’autorité que représentaient les zawiyas relayées par les ssuqs (marché traditionnels hebdomadaires). La transhumance concernait une population de bergers qui faisaient de l’estivage un lieu de vie : approvisionnement, cabanes. Cela donnait lieu à des festivités : zerda, des chants : idebbalen, des jeux : tir à la cible». Avec la colonisation française et la fermeture après 1863 des zawiyas et certains ssuqs, comme le souligne cet ouvrage, les solidarités inter-tribales ont été rompues. «Ce qui a eu pour conséquence de dépouiller le rituel de transhumance de sa densité sociale
jusqu’à n’être plus aujourd’hui qu’une banale manifestation économique concernant certaines familles, parfois même certains individus», expliquent les auteurs de l’étude, qui sont confortés par la réalité du terrain aujourd’hui.
L.  M.

article paru à la TRIBUNE 1

Renouant avec la traditionnelle transhumance dans le Djurdjura

Les Ath Boudrar fêtent le départ des bergers vers Agwni Lahwa

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Photo : M. Lyès
De notre envoyé spécial à Ath Boudrar
Lyes Menacer

Youyous joyeux des femmes faisant retentir le bendir, cortège de klaxons et de va-et-vient incessants des motocycles entre Tala N’tazart et Agwni Lahwa. L’ambiance austère qui règne au col de Tizi N’kouilal culminant à 1 560 mètres d’altitude, dans le Djurdjura, le restant de l’année, cède la place, le temps d’une journée, à la fête annuelle de la transhumance. Cette fête est organisée par les Ath Boudrar depuis maintenant six ans pour célébrer le départ, durant six mois, des bergers vers la montagne.En ce vendredi estival, dans cette partie du Djurdjura et loin de la canicule asphyxiante des grandes villes, les habitants de Tala N’tazart, un des principaux hameaux de la commune d’Iboudraren, relevant de la daïra d’Ath Yenni, se sont tous mobilisés pour faire de cette fête une réussite. Tôt dans la matinée, des membres du comité du village, aidés par quelques jeunes, étaient déjà à Agwni Lahwa (la plaine de la pluie) pour assurer une meilleure organisation de l’événement. La «route de l’est», une piste agricole à l’abandon depuis des décennies, a subi de légers travaux pour permettre aux véhicules de passer sans danger. Elle devait être bitumée mais le projet tarde à se concrétiser, affirment des villageois sur place. Les inondations meurtrières de 1974 et les secousses telluriques qui ont touché la zone plus tard l’ont rendu impraticable, même pour les randonnées pédestres. Chaabane, la quarantaine, affirme traverser, durant son adolescence, cette route sinueuse et serpentée jusqu’à presque atteindre le col de Tirourda, du côté d’Iferhounène, un point marquant la frontière entre Tizi Ouzou, Bouira et Béjaïa.

Une fête pastorale dans un cadre champêtre
Afin d’éviter tout accident, des jeunes, habillés de gilets vert-pistache jalonnaient le parcours pour rassurer les automobilistes qui devaient abandonner leurs véhicules et continuer, sur une distance d’un kilomètre, leur visite à pied. Regroupées autour d’un bassin d’eau, des vaches et des veaux semblaient apprécier la présence des hommes, des vieux, des femmes et des enfants. En cette période de canicule, en l’inexistence d’un coin ombreux, elles ne pouvaient pas s’éloigner de ce point d’eau que les bergers ont aménagé avec de la pierre et du ciment. Tombé en ruines, et faute de moyens matériels et financiers, «Amrah» ou l’enclos, un préau bâti en parpaings, n’a pas pu être reconstruit, peut-on constater.«A cause de l’insécurité, nous n’avons repris les pâturages que depuis quelques années seulement. Il y a beaucoup de choses à faire dans cet endroit», dit, du haut de ses soixante-cinq ans, Dda Abdellah, un berger de Tala n’Tazart. La veille de la fête de la transhumance, les hélicoptères de l’ANP ont pilonné durant toute la journée cette zone montagneuse, difficile d’accès et couverte d’une dense forêt de pins d’Alep et de cèdres. Pendant longtemps, Agwni Lahwa était une zone interdite en raison d’une forte présence de groupes terroristes à la fin des années 1990, explique Lamara, un habitant de Darna qui dit exercer le métier de berger depuis au moins un quart de siècle. Aujourd’hui, les choses ont beaucoup changé, ajoute-t-il. La sécurité est quasiment revenue sur les hauteurs du Djurdjura. Les guérites vides d’un détachement de l’armée nationale, au niveau du col de Tizi N’kouilal, sont le témoin du retour progressif de la sécurité. Et si de temps à autre, des terroristes sont éliminés par les soldats de l’ANP au niveau de cette zone, cela n’empêche pas les citoyens de Bouira, des Ouacif, et d’Ath Yenni de circuler librement, sur le chemin serpenté menant vers Aswel et Tikjda. Le bitumage de la RN 30 reliant Tizi Ouzou à Bouira encourage davantage les plus téméraires à reprendre la route du tourisme de montagne, surtout en été, durant lequel certains préfèrent l’air frais des hauteurs à la promiscuité des quelques rares plages ouvertes à la baignade.

L’estivage en montagne commence en avril
La fête de l’estivage vient en fait marquer la fin d’un cycle d’une pratique séculaire dans ces régions reculées et montagneuses du versant Nord du Djurdjura. Dès le mois d’avril, les éleveurs de bovins pâturent dans les champs situés non loin de leurs villages. Durant tout le printemps et jusqu’au début du mois de juillet, les bêtes sont placées dans des enclos traditionnels à Tahelouant, Azra Iderman, Agouni Khellil et à Ighzer, entre autres lieux d’alpage. Les enclos sont souvent construits à proximité de points d’eau, généralement des sources naturelles disséminées à travers la montagne. Parfois, l’eau est acheminée par des conduites que les bouviers confectionnent avec des tuyaux en plastique et en plomb. Ces abreuvoirs sont restaurés quelques jours avant le début de la saison d’estivage, tout comme les enclos que la neige et les pluies détruisent partiellement durant la saison hivernale. Ces étables en plein air servent à protéger les bêtes des vols et des animaux prédateurs qui rôdent dans le grand Djurdjura, cette masse rocheuse qui n’est pas seulement un lieu de villégiature pour les amoureux de l’escalade et de la nature, mais aussi une source de vie pour le bétail.
Pendant que les cheptels sont placés en contrebas du flanc de la montagne, les bergers préparent les autres sites d’accueil pour leurs bêtes au niveau d’Agwni Lahwa dont une partie est couverte par une dense forêt de cèdre et de pin d’Alep. Le majestueux pic de Lalla Kheddidja, la Sainte, qui offre une vue d’une rare beauté sur la Kabylie, avec ses 2 300 mètres d’altitude, n’est pas loin. N’ayant pas le temps pour dominer de leur regard la plaine et pour éviter de se brûler les ailes comme Icare, pour s’être trop approché du soleil, les bergers restent à Agwni Lahwa afin de réunir toutes les conditions nécessaires pour une saison d’estivage sans de graves incidents. Malgré leur longue expérience dans le métier et leur connaissance du terrain escarpé de la montagne, les bergers perdent régulièrement des veaux imprudents qui tombent accidentellement dans les ravins. C’est surtout du vol de bétails dont se plaignent les pâtres qui ont à chaque fois recours à l’administration judicaire pour punir les voleurs dont certains sont originaires des Imchedalen, Imsdourar et Iwakouran, des villages du versant Sud du Djurdjura et qui relèvent de la wilaya voisine de Bouira. «Je viens de libérer deux veaux que j’ai trouvé attachés à un arbre. Les voleurs ont sûrement pensé revenir les prendre à la tombée de la nuit comme ils ont l’habitude de le faire», déclare Lamara, précisant que sans la vigilance de ses «collègues» bergers, ils auraient perdu tout le bétail qu’ils ont élevé avec beaucoup de peine et de labeur.Pour la saison 2010, les 25 bergers qui se sont installés à Agwni Lahwa, où se trouve la célèbre source d’eau que les habitants locaux dénomment «Tamduct n’llaz» (la source apéritive), doivent surveiller de près environ 700 bovins. Ces fellahs, dont certains ont commencé ce métier dès leur plus tendre enfance, se font habituellement aider par leur  progénitures qui les ravitaille régulièrement en galette de pain traditionnel et autres produits alimentaires, leur évitant ainsi de quitter leurs cabanes en montagne durant la période des six mois d’estivage.

La fête de la transhumance, un moment de solidarité
Habituellement organisée au mois d’août, cette année, la fête de l’estivage a été avancée à la fin du mois de juillet, en raison du mois de Ramadhan. Les femmes chargées de préparer l’offrande (couscous, viande et gâteaux traditionnels), se sont donc donné rendez-vous à la place du hameau de Tala N’tazart. Elles ont été déplacées dans le bus mis à la disposition des villageois par le maire d’Iboudraren qui a voulu apporter aussi sa contribution, du mieux qu’il pouvait, à cet événement pastoral.C’est sous l’ombre rafraîchissante du cèdre et du pin d’Alep que le succulent couscous a été servi à tous ceux qui ont fait l’effort d’honorer par leur
présence le rassemblement des bergers des Ath Boudrar. Entre deux bouchées, les plus jeunes parmi les présents ont saisi l’occasion pour écouter les légendes qui ont accompagné les bergers à travers les temps. Le chant des femmes et des jeunes filles qui entonnaient des airs kabyles, puisés du terroir, n’a fait qu’ajouter de la gaité à la joie qui illuminait le visage des enfants et des organisateurs de la fête, contents de voir tous les habitants apporter leur contribution. Jusqu’à presque quatorze heures, la dense forêt de cèdres d’Agwni Lahwa continuera de grouiller de monde. Les visiteurs n’ont cessé d’affluer depuis la matinée. Pour certains, l’idée de revenir l’année prochaine, pour assister à la fête de l’estivage, est déjà inscrite dans leur agenda. A Tala N’tazart, la fête s’est poursuivie avec l’organisation d’un concours de poésie, un autre concours culinaire pour les vieilles femmes et un mini-cross pour toutes les tranches d’âge. A la maison de jeunes du village, des conférences sur le diabète et le tabagisme ont été dispensées par des professeurs universitaires. Une occasion a été également offerte aux femmes au foyer pour exposer toutes sortes de produits artisanaux dont des bijoux, de la poterie et des robes kabyles. Sur les hauteurs du Djurdjura, à quelques encablures de Tizi N’kouilal, et après avoir goûté à leur part de l’offrande, Lamara et Abdellah, les plus âgés des bergers de la région, ont repris la direction du sentier qui mène à Imrahen et à Takharat où les bovins faisaient tranquillement leur sieste en attendant l’arrivée des pâtres. 
L. M.
Portrait de deux bergers hors normes
Dda Lamara, un pâtre septuagénaire
Trapu et de petite taille, Dda Lamara exerce le métier de berger depuis vingt-cinq ans. Du haut de ses 72 printemps, il continue à parcourir le Djurdjura, à la recherche d’alpage pour ses bovins, comme un jeune athlète de vingt ans. Cet amoureux de la nature trouve sa paix intérieure au milieu de ses bêtes et de cette montagne dont il connaît les moindres recoins. Il suffit de lui demander pour qu’il nomme chaque parcelle et indique les sources d’eau potable. Affable et tout le temps souriant, il n’hésite pas à communiquer ses connaissances à tout jeune désireux de se lancer dans le métier de bouviers que l’on sait pénible dans ces zones escarpées de Kabylie. Dda Lamara a le secret de pouvoir approcher ses bêtes sans les déranger ou les faire fuir. Tendre et affectueux avec elles, il ne lésine sur rien pour les soigner et les mettre à l’abri de tout danger les guettant.
Dda Abdellah, jeune berger de soixante ansLe visage émacié par les rudes hivers qu’il a passés en montagne, Dda Lamara raconte son expérience en tant que berger avec force détail, signe de l’amour qu’il porte à ce métier qui le fait vivre, lui et sa nombreuse famille. La particularité de Dda Abdellah c’est qu’il se consacre à cette activité depuis moins de dix ans, depuis sa sortie à la retraite. Mais des légendes qui mythifient son métier de bouvier, il en connaît et se fait plaisir de les narrer aux plus jeunes pour qu’ils sachent que le Djurdjura n’est pas seulement cette masse rocheuse, avec ses forêts ombragées, ses sources et ses cols. Pour lui, les lieux d’alpages sont chargés d’histoire commune et des hommes sont tombés en se battant pour le contrôle d’un territoire, à première vue hostile à toute forme de vie humaine, en raison de son relief accidenté aux conditions climatiques insupportables, son éloignement des grands centres urbains et l’inexistence de suffisamment de terre pour l’exercice
de l’activité agricole. 
L. M.

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